Pourquoi on en parle si peu ?

Une bonne question que l’on est en droit de se poser à propos de la contraception masculine est sans doute : pourquoi on en parle pas ? Pourtant le sujet a eu de nombreux échos dans la presse au tournant des années70/80,  à l’époque où le premier groupe d’ARDECOM mettait en place les expérimentations initiales.  Il semble que désormais, dans les médias, prévalent le silence, la volonté de ne pas savoir, pire, de dire obstinément que la CM n’est pas possible, qu’elle est un doux rêve, (peut-être, un jour…), un aveuglement obstiné et incompréhensible. Je vais tenter de développer ce petit texte au fil du temps et des occurrences.

1/il y a quelque temps, la fabrique de l’histoire, une émission de France Culture, organise une semaine consacrée à l’histoire de la masculinité. Dans ce cadre, la deuxième émission est consacrée par Anaïs Kien à la CM « dans les années70 ». Présentation que l’on peut contester « …quand les hommes étaient un peu mis à l’écart de la réflexion sur la contraception par le MLF… » alors même que le mouvement de réflexion des hommes est profondément lié aux expérimentations fertiles du féminisme de ces années, mais là n’est pas le point. Non, ce qui m’a fortement interrogé après avoir écouté l’émission avec toute l’attention que l’on peut imaginer, c’est qu’il en ressortait une curieuse indécision : finalement, cette histoire un peu étrange de CM, ça a existé ? ça existe ? ou pas ? Étrange résultat, mais ce n’était peut-être qu’une impression toute personnelle. Il se trouve que j’ai peu, de temps après, l’occasion d’en discuter au téléphone avec le Dr Jean-Claude Soufir, celui-là même qui a mis au point et développé les premiers protocoles hormonaux de la CM. « Oui, c’est cela, me dit-il, ce qui ressort de l’émission, c’est qu’on se demande si ça existe vraiment, en définitive… ». Tiens, ma première impression n’était pas seulement issue de mon atroce mauvaise foi, c’est bien ce qui ressort de cette émission. Mais pourquoi ? Est-ce que la CM, qui existe de manière concrète et sous deux formes différentes depuis plusieurs années maintenant, est à ce point inentendable, inconcevable que les preuves mêmes de son existence ne peuvent pas franchir la barrière de nos préjugés ? Je connais une partie des personnes interrogées, je sais pertinemment qu’elles n’ont pu qu’entériner la vérité : oui, ça existe. J’ai été personnellement interrogé par Anaïs Kien (avec des question que l’on ne peut inventer du genre « quand avez-vous pris la décision de devenir un activiste de la CM? ») et je sais ce que je lui ai répondu : oui, ça a existé, ça a fonctionné, ça existe maintenant de façon plus avérée, vérifiée, contrôlée par l’OMS. Alors pourquoi ?

2/ Une journaliste du magazine Causette  me téléphone pour une interviou. Elle m’annonce un prochain dossier sur le sujet de la CM. Après diverses aventures (la première journaliste est débarquée du sujet, une autre prend le relais), je totalise deux intervious successives pour presque deux heures d’entretien. Je lui fais parvenir le film en urgence. Je sais que les Dr  Soufir et Mieusset, les deux spécialistes en pratique de la question, ont été interviouvés également. Le livre qu’ils ont cosigné chez Springer (la somme la plus récente sur la question) a été envoyé au journal.  Bref, le doute n’est plus permis et même si je ne m’attends pas à un miracle, je ne vois pas comment on pourrait contourner la réalité des faits. A l’arrivée, que voit-on ? Un dossier étrange et consternant, s’obstinant à colporter une ambiance de perplexité sur la question. Alors que la parole des deux spécialistes susnommés n’est pas rapportée, tous les témoignages pouvant induire l’incrédulité sur la réalité ou même la faisabilité de la CM occupent l’essentiel des deux articles. Pire, pour ce qu’on m’en rapporte, « les deux spécialistes de la contraception masculine cités n’en ont aucune expérience clinique – aucune publication sur ce sujet. » Encore une fois, Causette toujours, tu m’intéresses ? Comment peut-on comprendre cela ?